SAKI



Hector Hugh Munro, alias Saki, est un écrivain acerbe, dont la gouaille impressionne d’emblée. 
Dans « L’omelette Byzantine », recueil de courtes histoires, se déploie une critique au vitriol de la société anglaise de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle.

Une ironie redoutable, presque lugubre, s’infiltre derrière ses nouvelles.
Clairement, par le passé, jamais je n’avais lu de choses aussi délicieusement méchantes.
Redoutables descriptions de ce monde petit-bourgeois, composé de personnes aux comportements ridicules et impitoyables, s’ennuyant ferme, et surtout, se prévalant d’idées politiques souvent approximatives.

Dans la prose de Saki, le diable se cache dans les détails.
Ce faisant, l'approche n'est jamais manichéenne. 
L’auteur se moque éperdument des politiciens, des chasseurs, et surtout des mères de famille, qu’il n’épargne pas ; dès le début, il y a lieu de s'inquiéter, car la seule nuance tient à un terrible rire sardonique qui se profile, en filigrane.

Pas sûr que les féministes soit des lectrices assidues de Saki.
D’ailleurs, le bonhomme a souvent été taxé d’être misogyne et antisémite, à l’instar de P. Roth.
Cela étant, Roth est lui, paradoxe étonnant, un juif taxé d’antisémitisme.

Dans ces histoires courtes, mon cœur balance entre « Pauvres Froplinson » et « La disparition de Crispina Umberleigh », même si je dois bien avouer que cette dernière l’emporte.

« Il y a des gens qui sont nés pour commander ; Crispina Umberleigh était née pour légiférer, codifier, administrer, censurer, licencier, bannir, exécuter, et plus généralement rendre la justice. Si ce n’était pas une tendance héréditaire, elle se manifesta dès l’âge le plus tendre. Des profondeurs de la cuisine jusqu’aux chambres des domestiques, tous tombaient sous sa férule despotique et demeuraient là avec la soumission de mollusques surpris par une période glaciaire. »

Suite au mystérieux kidnapping de cette terrible Crispina (« dame de fer » avant l’heure), une rançon est demandée. Le mari, porté par des ambitions politiques, savoure tellement le calme du fait de l'absence de sa femme, qu'il décidera de contribuer à la rançon afin qu’elle ne revienne jamais à lui.

Cruel, assurément, mais souvent drôle.

Saki, arrivé à la quarantaine, s’engage volontairement dans la guerre 14-18.
Avant de mourir sur le front de la Somme en 1916,  ces derniers mots auraient été : «  éteignez cette lumière, nom de Dieu ou on va se faire tuer ».
Jamais l’on ne saura si cela tient de la rumeur (phénomène si violemment critiqué par Saki lui-même), ou du dernier sursaut d’une personnalité hors norme.

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