Tout le monde dormait encore,




quand dans le lit, elle s’était tournée vers lui, avait passé ses cuisses autour de sa taille et l’avait réveillé. Les chiffres du réveil indiquaient trois heures, et ils ne dormaient déjà plus. Bientôt, ils étaient tous les deux debout dans la pièce, car ce lit qui avait été si idéal pour faire l’amour l’était maintenant nettement moins pour parler.

Elle venait d’ouvrir le frigo pour y chercher le thé, la tête encore ailleurs, tandis que lui s’était assis sur le bord d’une des fenêtres qu’il avait grand ouvert. Il regardait les feuilles du peuplier s’exciter dans la nuit, alors que derrière, il l’entendait chanter. Elle avait pris cette habitude de chanter quand elle se réveillait hors de chez eux, mais ça ne l’avait jamais dérangé.

En revanche, il n’avait jamais aimé sa façon de conduire. Il lui disait souvent qu'elle se traînait, mais cette nuit, il ne voyait pas d’inconvénient à ce qu’ils prennent leur temps. La voiture collait bien à la route, et à moins d’un chevreuil traversant la chaussée, ils arriveraient rapidement à la mer. Par la vitre entrouverte, il croyait déjà sentir le sel se poser sur sa peau et il regardait les étoiles, pensant qu’elles ne disparaîtraient pas avant six heures minimum. Cette idée le rassurait. De temps en temps, il posait la main sur sa cuisse droite en traçant des motifs absurdes. Sans la voir directement, il savait qu’elle souriait de son geste. Ainsi, il espérait la maintenir éveillée, et puis surtout, lui faire comprendre qu’après ce réveil difficile il était là et bien là. Bientôt, les traits éparpillés sur le goudron se sont rejoints en une seule ligne blanche, la route s'est insinuée à travers les dunes et ses doigts s'enfoncèrent plus fort encore dans le volant.

Sur le parking, la voiture est restée immobilisée un instant, puis les feux se sont éteints. Ils sont descendus chercher les affaires dans le coffre. Il  s'empara d'un grand sac et elle prit la glacière, mais avant d’aller plus loin, il lui demanda de rallumer les phares pour mieux voir le chemin qui les mènerait à la plage. Depuis l’été dernier, le sable s’était amassé des deux côtés, formant comme une sorte de goulot, et il fallait maintenant franchir ce conduit pour rejoindre la plage. Il s'y enfoncèrent à l’aveugle, tâtonnant par endroit. Devant eux, la plage apparaissait aussi noire que le ciel et le froid traversait leurs semelles. Ils continuèrent en courant pour se réchauffer, criant dans le silence de ce bord de mer. Puis ils trouvèrent au bout, entre les blocs de granit rose, un coin plus lumineux. Ils s'y posèrent en essayant d'observer les environs. Il sortit deux sacs de couchage qu'il tâcha de joindre l'un à l'autre, puis quand ils s'allongèrent dedans, il lui demanda ce qu'il y avait dans la glacière. Des crevettes, elle lui dit. Des crevettes ? Bah oui, des crevettes, des crevettes idiot, des crevettes ! Il la poussa contre le sol, lui enfouissant les mains dans le sable, et plus tard, ils mangèrent ensemble les crevettes, bercés par la marée.



PS : A l’attention de Luciole. Au départ, j’ai voulu appeler ce texte le machin-bidule à l’abricot, mais je n’ai pas réussi à le caser. Ce que tu penses de mon blog me fait plaisir, et quelque part, je suis soulagé que tu n’ais pas totalement disparu de ma vie. Un an et demi de silence total, ça aura été extrême et nécessaire, extrêmement nécessaire même, mais ni toi ni moi ne méritons plus ça aujourd'hui.



2 commentaires:

  1. La mayo ? elle a pensé à la mayo pour les crevettes ? ^^

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  2. Eh bien, je vois qu'on est en même temps sur mon blog. C'est vrai que je n'ai pas pensé à faire entrer la mayo dans l'histoire, mais je fais confiance à mes personnages. Ils ont sûrement prévus plein d'autres trucs auxquels je n'ai même pas pensé.

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