Nanni Moretti - Habemus Pappam (2011)



Il y eut le Moretti se livrant dans le sobre « Journal intime », puis le Moretti exhumant dans « la Chambre du fils », et enfin le Moretti démontant pièce par pièce les rouages de l’ère berlusconienne dans le très sous-estimé « le Caïman ».

Avec « Habemus Pappam », c’est le retour de l’enfant prodigue du cinéma italien.
Le cinéaste s’est effectivement assagi, ou en tout cas, le Vatican semble lui avoir ôté l’extravagance. Nuance tout de même : le tournoi de volley entre les cardinaux dans la cour du Vatican est un grand bol de surréalisme.

Nanni Moretti, donc, acteur-réalisateur comme dans ses précédentes productions.
Il incarne ici un psychanalyste, rôle qui lui allait si bien dans la « Chambre du fils », sauf qu’il est ici confronté non pas au deuil « classique » (le plus terrible) mais au « deuil amoureux ». Le voilà plaqué par sa femme, elle-même psychanalyste, pour un autre psychanalyste (vous voyez le tableau). A cela, il ne voit qu’une raison : son ex femme faisait un complexe d’infériorité par rapport à lui. Il faut trouver raison à tout pour continuer d’avancer, alors parfois, autant que ce soit la plus absurde.

Enfin en l’occurrence, l’absurdité de la chose n’est pas certaine.
« T’es le meilleur », voilà ce que tout le monde lui dit. C’est ainsi qu’il est appelé un jour à psychanalyser le pape fraichement élu (incarné par un Michel Piccoli impeccable). Celui-ci doute, ne sait pas, ne veut pas, ne sait pas. Veut-il endosser cette responsabilité ? Ne sait pas. Peut-il endosser cette responsabilité ? Ne sait pas.

En filigrane, toujours cette foule impatiente sur la Place Saint-Pierre. Les cardinaux quant à eux s’occupent comme ils peuvent en attendant la suite. Ces scènes sont souvent drôles et rarement féroces. Selon moi, le cinéaste ne noie pas ces religieux sous le flot de la dérision. 
Au contraire, il leur donne vie en les montrant hommes parmi les hommes. Des êtres chez qui les doutes et l’ennui ne sont pas pure abstraction. Et puis, ils ne sont jamais dénués d’une certaine énergie. Belle à voir.

Quant au nouveau pape ? L’est il vraiment ?
Michel Piccoli dans ce rôle me fait terriblement penser au Holden Caufield de J. D. Salinger.
Certains fuient leurs responsabilités pour ne pas perdre leur jeunesse, d’autres les fuient pour ne pas perdre leur vieillesse.

Même si " Habemus Pappam" n'est pas le meilleur Moretti, 
il s'agit sans conteste d'un Grand Film. 



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